OPINION

Pour un humanisme à l’ère du digital

avril 2017

Nous vivions une époque exaltante, riche en révolutions techniques et scientifiques sans précédent : la réalité augmentée,  l’intelligence artificielle, l’Internet des Objets, les nanotechnologies… et il semble que ces révolutions soient le fruit d’une confiance et un amour absolus de la technologie, qui remettent en cause la pertinence de l’humanisme. L’humanisme, comme croyance dans la valeur suprême de l’être humain, et comme quête perpétuelle d’un développement de ses qualités et de l’amélioration de sa condition.

Dans le design, la digitalisation de la création a eu lieu dans les années 1990 lorsque les ordinateurs et internet ont consacré les contenus visuels, facilité le processus de création (d’images, de vidéos, de logos !) et généré un nombre inédit de vocations dans les métiers du design. Il est désormais plus facile, avec les ordinateurs personnels et des logiciels de plus en plus sophistiqués et simples d’utilisation, de créer de belles images, sans le procédé chronophage de dessiner avec un crayon, un Rotring et un perroquet, et de raffiner le dessin d’une lettre à l’aide d’un scalpel sur du papier calque (oui, cela se faisait encore dans les années 1990).

Les révolutions actuelles portent en elle de grandes promesses et annoncent un avenir plein de possibilités. Mais il est important de maintenir l’être humain au centre de ses révolutions. Nous pensons que de plus en plus, l’humanité aura besoin de design pour rendre son environnement plus beau, plus compréhensible, plus interactif, mais le design aura lui aussi de plus en plus besoin d’humanisme.

L’humanisme, comme démarche visant à mettre les interactions humaines au centre de la création:

Nous croyons que les meilleurs relations entre les êtres humains ont donné lieu aux meilleures créations: des relations entre designers et décideurs, basées sur un respect mutuel et un état d’esprit véritablement ouvert, pour imaginer de grandes choses et les rendre possibles, des relations entre mentors et protégés, dans lesquelles chacun s’enrichit entre les jeunes rêveurs et les maîtres de leur domaine pétris d’expérience, des relations entre designers même, qui inspirent et créent une compétition saine, une émulation qui pousse chacun au-delà de leurs meilleures limites.

L’humanisme, comme référence aux Humanités – à l’étude de la littérature, de l’Histoire, et des Arts

Nous croyons que le design doit être nourri par un terreau de culture sur lequel on cultive des identités de marque, des contenus de marque, ou des marques tout court, qui ont du sens, du caractère, de la profondeur, et de la singularité.

L’un des principes qui animaient Steve Jobs et qui a fait d’Apple une entreprise unique au monde, c’est d’humaniser le design, de lui insuffler un supplément d’âme via les Humanités: «  la raison pour laquelle Apple réussit à créer [de superbes produits], c’est parce que nous avons toujours essayé d’être à l’intersection entre la technologie et les lettres et sciences humaines. » Les designers d’aujourd’hui et de demain devraient viser l’idéal du polymathe, ou de l’Homme de savoir universel, l’idéal de la Renaissance ou des Lumières, des Hommes comme Leonard de Vinci ou… Isaac Newton qui apparaît sur le premier logo d’Apple !

L’humanisme, c’est croire que la main de l’Homme (avec une technologie de pointe à son service) peut penser des créations qui seront bien plus durables, touchantes et mémorables que le produit de n’importe quel algorithme.

Ce n’est pas une blague – des générateurs de logos existent.

Nous pourrions parler des heures de toutes les promesses qu’annoncent les progrès technologiques et scientifiques dont nous sommes témoins aujourd’hui, et nous pensons aussi qu’insuffler plus d’ humanisme dans ces avancées qui vont former l’avenir de l’Homme est nécessaire. Tout comme il est nécessaire de pétrir le design d’humanisme pour rendre les marques plus intelligentes, « cultivées » et inspirantes.  Ce ne peut pas être le produit d’une formule.